Aïkido

 

L’Aïkido (合気道, aikidō) est un art martial japonais (budo), fondé par Morihei Ueshiba O sensei entre 1925 et 1969. L’Aïkido a été officiellement reconnu par le gouvernement japonais en 1940 sous le nom d’aikibudō et sous le nom Aikido en 1942 donné par la « Dai Nippon Butoku Kai », organisme gouvernemental visant à regrouper tous les arts martiaux japonais pendant la guerre. Il a été créé à partir de l’expérience que son fondateur avait de l’enseignement des koryu (écoles d’arts martiaux anciennes), essentiellement l’aikijutsu de l’école daitō ryū et le kenjutsu (art du sabre japonais). L’Aïkido est né de la rencontre entre ces techniques de combat et une réflexion métaphysique de Morihei Ueshiba sur le sens de la pratique martiale à l’ère moderne.

L’Aïkido se compose de techniques avec armes et à mains nues utilisant la force de l’adversaire, ou plutôt son agressivité et sa volonté de nuire. Ces techniques visent non pas à vaincre l’adversaire, mais à réduire sa tentative d’agression à néant. L’Aïkido peut être considéré comme la concrétisation du concept de légitime défense : une réaction proportionnée et immédiate à une agression. En fait, dans l’esprit de l’Aïkido, il n’y a pas de combat, puisque celui-ci se termine au moment même où il commence. Conformément à cette logique, il n’existe pas de compétition d’Aïkido excepté dans le style Shodokan fondé par Kenji Tomiki (et de ce fait appelé aussi Tomiki ryu, École Tomiki).

De plus, l’Aïkido est aussi intimement lié à la religion Shinto. En 1942, O’Sensei Morihei Ueshiba érigea à Iwama (près de Tokyo) un sanctuaire dédié aux 42 dieux et déesses protecteurs de l’Aïkido : L’Aïki-jinja 合気神社 est aujourd’hui classé monument historique.

Historique de l’Aïkido

Comme la plupart des budō modernes (judo, karaté, kendo…), l’Aïkido est l’héritier des arts martiaux développés durant les périodes de guerre, qui furent modifiés lors des périodes de paix (ère Tokugawa) et de la disparition de la classe des samouraïs (restauration de Meiji).

Morihei Ueshiba était un fervent pratiquant shinto, il fut également initié à la religion Ōmoto-kyō, au bouddhisme Shingon et au Kototama. Il avait par ailleurs une expérience réelle de la guerre : il participa à la Guerre russo-japonaise, et nombre de ses élèves moururent durant la Seconde Guerre mondiale. Son parcours, emblématique d’une authentique réalisation spirituelle, passant de techniques guerrières visant à tuer rapidement un adversaire à un art visant l’accomplissement de l’être humain, le conduisit à recevoir la révélation de nouvelles techniques martiales, et à devoir nous transmettre l’« art de paix », dont le but serait d’améliorer l’Homme, d’un point de vue physique mais surtout comportemental (tolérance et paix) et spirituel.

Le terme Aïkido

Calligraphie des trois caractères composant le terme japonais « aikido »
Calligraphie des trois caractères formant le terme « aikido », de haut en bas : ai, ki, dō.
Le terme aïkido (aikidō en japonais) est composé de trois kanjis signifiant :

合 ai : du verbe au, concorder ; harmonie
気 ki : énergie
道 dō : la voie.
Aïkido peut donc se traduire par « la voie de la concordance des énergies »5.

En effet, le terme « concordance » est plus près du sens japonais original de l’aiki comme étant une action de rencontre (explicité dans la composition du kanji) que le terme « harmonisation ». L’« harmonie » peut être le résultat souhaité de la pratique de l’Aïkido, mais on ne fait pas d’Aïkido sans faire concorder les énergies. L’Aïkido, par la concordance (« mettre les cœurs ensemble »), amène à un résultat où il sera possible de communiquer avec l’« adversaire », chose impossible si on a dans l’idée de l’harmoniser (« amener à une entente, se mettre d’accord », ce qui peut être impossible) ou de le détruire. Un autre problème soulevé est qu’« harmonie » implique souvent une notion d’amitié ou de paix, ce qui est superflu (on ne peut pas être aimé par tout le monde, même si l’on aime soi-même tout le monde). Par exemple, les Japonais utilisent le mot wagō (和合) pour « harmonie », terme composé de « paix » et de « concorder » : en concordant vers la paix, on crée l’harmonie.

 

Pratique de l’aïkido
L’aïkido est pratiqué par des femmes et des hommes de toutes tailles et âges. Le but de la pratique est de s’améliorer, de progresser (techniquement, physiquement et mentalement) dans la bonne humeur (le fondateur Morihei Ueshiba insistait beaucoup sur ce point). Ne sont montrées que des techniques respectant le partenaire. La complexité de cet art demande un haut niveau de pratique dans son utilisation en combat réel. S’il est vrai que les techniques de base reposaient sur des pratiques académiques classiques et étaient adaptées à un style combatif, il reste que l’Aïkido n’est pas une pratique pour apprendre à se battre mais un art martial qui permet de se préparer, autant physiquement (souplesse, rapidité, musculature), mentalement (rester calme en toutes circonstances) que techniquement (respecter la distance de sécurité, trouver l’ouverture, se placer, gérer plusieurs attaques simultanées) à l’éventualité d’attaques de toutes sortes (et pas seulement des attaques codifiées). Ce n’est surtout pas un sport, mais une façon d’appréhender l’Homme.

Il existe différents styles d’Aïkido répondant à différentes aspirations. Le style le plus répandu est celui initié par le propre fils du fondateur, Kisshomaru Ueshiba, style connu sous le nom d’Aikikai. Cependant, pour comprendre l’existence d’écoles différentes, il faut prendre en compte le fait que le fondateur de l’Aïkido a créé cet art martial et l’a développé tout au long de sa vie. S’il fut un soldat patriote et brillant dans les années 1930, contribuant à la militarisation des esprits en lien avec des organisations secrètes comme la Société du Dragon Noir ou des politiciens d’extrême-droite tels Oawa Shumei, Inoue Nissho et Kozaburo Tachibana, tous membres du groupe ultranationaliste Sakurakai dont certaines des réunions avaient lieu au Ueshiba Dojo, le fondateur de l’Aïkido fut profondément bouleversé par l’usage de l’arme atomique en août 1945 et la défaite japonaise qui lui suivit et devint dès lors un pacifiste convaincu. Si le patriotisme de Ueshiba ne prête pas à controverse son pacifisme est bien plus accrédité par ses propos humanistes (voir dans les notes le propos tenu à Morihiro Saito venu requérir son enseignement) et par sa contribution aux orientations de l’évolution de l’Aïkido que par ses engagements auprès de Onisaburo Deguchi gendre de Nao fondatrice de l’Omoto Kyo organisation sectaire dont les discours pacifiques et internationalistes se doublaient d’idéologies et de pratiques à caractère fascisant. L’Aïkido devient donc le premier art martial japonais à être autorisé par les Autorités américaines qui occupent le Japon en 1948 (création de l’Aïkikaï Hombu dojo) et Ueshiba Senseï situe lui-même dans son interview de 1957 sa conversion au pacifisme vers 1950. En cela il suit parfaitement l’allocution de l’empereur Hirohito lors de la capitulation qui encourageait son peuple à « ouvrir la voie à une ère de paix grandiose pour toutes les générations à venir ».

Morihei Ueshiba eut de nombreux disciples qui ont propagé des techniques en perpétuelle évolution. On peut distinguer celles d’avant-guerre très dures et visant avant tout l’efficacité, puis celles des années Iwama 1942-1952 plus fluides mais conservant atemis et armes, et enfin la dernière période beaucoup plus souple encore. Dans celle-ci on ne voit plus le Fondateur pratiquer Ikkyo omote sur Shomen par exemple… Il ne le passe plus qu’en ura. Chacun des disciples d’O Senseï a acquis une facette de cet art complexe qu’ils ont ensuite à leur tour transmis comme le véritable Aïkido, contribuant ainsi à l’évolution des techniques jusqu’à la mort du Fondateur et même bien après. Ainsi, Tadashi Abe de retour au Japon après 8 ans passés en France ne reconnaît déjà plus l’enseignement de l’Aïkido au sein de la maison-mère Aïkikaï et lui remet ses grades, claquant ainsi la porte de la Fédération. D’autres maîtres apprennent des choses différentes en fonction de la période et de leurs sensibilités diverses, ce qui explique la création de différentes écoles. Rien qu’en France il n’y a pas moins d’une vingtaine de styles différents ! Une autre version précise que l’Aïkido naît à Iwama en 1942 n’a en réalité jamais profondément changé mais que ce sont seulement les responsables de l’Aïkikaï qui ont déformé la pratique martiale du Maître afin de mieux la populariser13,14. Ainsi Saïto senseï a-t-il été surpris de découvrir que les techniques du livre “Budo” de 1938 étaient exactement celles qu’a pratiquées Ueshiba senseï avec lui pendant des années, sachant que Saïto a commencé l’Aïkido en… juillet 1946